La visite immobilière : stop ou encore ?
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Proprioo, Marton, Immo Fixe, Immo-pop… Le nombre d’agences immobilières sans commission a explosé ces derniers mois. Leur point commun : elles délèguent l’étape des visites à leurs clients vendeurs pour alléger la dimension logistique et le coût de leur prestation. La visite est-elle toujours au cœur de la mission d’agent immobilier ? Sur cette question, les avis divergent
!
Dans les années 2000, une publicité marquait les annales immobilières. On y voyait l’humoriste Pierre Palmade jouer le rôle d’un agent immobilier peu compétent pendant une
, sous les yeux ébahis des clients. « Les agents immobiliers ont longtemps été perçus comme de simples porte-clés », déplore Henry Buzy-Cazaux, président de l’IMSI. Alors que la visite immobilière est historiquement au cœur du métier, certaines agences ont décidé de s’en passer. C’est le cas de Marton, qui propose un forfait fixe à 2000 euros pour vendre un bien, quel que soit son prix. « Les acheteurs préfèrent rencontrer les propriétaires pour discuter du bien en direct. Rappelons que plus de la moitié des vendeurs tentent d’abord de vendre par eux-mêmes : faire visiter n’est pas un frein », assure Thomas Laurentin, président de Marton France.Olivier Lanza, fondateur de Homagency,une plateforme digitale de services immobiliers pour transactions entre particuliers, abonde dans son sens : « Pour des biens de luxe, la visite a une raison d’être. Elle se justifie moins pour les biens ordinaires. Contrairement à l’agent, le vendeur sait répondre à 100 % des questions ». Un avis que partage Simon Primack, fondateur de Proprioo. Avec deux bémols toutefois : la qualification et la logistique. « Pour que cela fonctionne, il faut qualifier le projet de l’acheteur le plus finement possible en amont, coacher le vendeur et lui proposer de faire les visites à sa place s’il ne peut pas s’en charger », indique-t-il.
Une fausse bonne idée ?
Sans surprise, les agences traditionnelles restent très attachées à la visite immobilière, notamment pour des raisons commerciales. « C’est précisément pendant les visites que les clients formulent des freins. Quand on parvient à les lever d’emblée, on permet au client de continuer à se projeter. Dans tous les cas, une visite est toujours positive, même quand elle n’aboutit pas. C’est le meilleur moyen de découvrir le client et son projet », observe Marc Bouju, directeur associé de l’agence indépendante IM Valoris, à Tours.
A l’image de Pierre Palmade, on ne s’improvise pas agent immobilier… et encore moins négociateur. « Laisser les propriétaires gérer les visites, c’est la fausse bonne idée. D’ailleurs, c’est toujours mieux quand ils ne sont pas là. Les clients prennent le temps de visiter, ils sont plus détendus, ils ne donnent pas l’impression qu’ils sont intéressés alors qu’ils ne le sont pas. Cela évite les situations où le vendeur trop bavard déclare qu’il ne descendra pas en dessous de 180 000 euros quand le bien est affiché à 200 000 », constate Marc Bouju. Pour lui, la visite virtuelle peut apparaitre comme une bonne alternative pour filtrer les demandes et optimiser les déplacements. La technologie apparaît en outre comme un moyen supplémentaire de justifier les honoraires et la valeur ajoutée d’une agence.
Un échec dans le locatif
« Au début des années 2000, nous avions essayé de redéfinir le périmètre du service pour baisser les honoraires de location. Dans les villes étudiantes, on confiait les clés aux candidats locataires avec un plan, en échange de la carte d’identité. Cette expérience n’a pas duré longtemps », raconte Henry Buzy-Cazaux, qui était alors DGA de Foncia. Expérience similaire pour Marc Bouju à la même époque, qui avait fini par abandonner l’idée pour des questions de responsabilité juridique.
« Il est naturel de réfléchir à des moyens de faire baisser les honoraires. Les apporteurs de solutions digitales sont tout à fait respectables. Je garde toutefois la conviction que laisser tomber les visites, c’est comme déléguer la rédaction des actes : cela porte un grand préjudice au métier d’agent immobilier », conclut Henry Buzy-Cazaux.
Gaëlle Fillion