« La promesse que Bien’ici détrône SeLoger s’avère crédible »
Par Aurélie Tachot | Le | Portails de petites annonces
Après être passé par les groupes Figaro Classifieds et Logic-Immo.com, Cyril Janin intègre le Comité de direction du portail Bien’ici en tant que nouveau président. L’entrepreneur du digital, ancien directeur général de Logic-Immo.com, sera en charge de dessiner la stratégie de développement du portail, qui génèrera 9,5 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2018. Ses ambitions, ses priorités, sa vision du marché… Cyril Janin répond à nos questions.
Vous venez d’être nommé président de Bien’ici alors qu’il y a quelques années, vous étiez l’un des plus critiques. Comment l’expliquez-vous ?
Par le passé, j’ai été président du directoire de Figaro Classifieds suite à la fusion, en juillet 2016, de Keljob, Cadremploi et Explorimmo puis j’ai occupé le poste de directeur général de Logic-Immo.com, qui a été racheté par le groupe Axel Springer en février 2018. J’ai donc eu la chance, ces dernières années, de voir de l’intérieur des compétiteurs importants. Jusqu’ici, j’avais des idées préconçues sur Bien’ici. C’était un site que je ne connaissais pas bien. Je n’avais par exemple pas perçu la finesse de l’algorithme en matière de géolocalisation, qui permet aux agents immobiliers de changer manuellement la zone de localisation d’un bien à l’échelle d’un quartier. Sur le neuf, je n’avais pas non plus perçu que Bien’ici était allé aussi loin en matière de modélisation 3D. Bref, je n’avais pas compris la richesse avec laquelle le portail avait été conçu pour les professionnels et les particuliers.
Pour quelles raisons étiez-vous si dubitatif quant à la réussite du portail ?
Pour moi, la géolocalisation était une fausse promesse. Mais, depuis le lancement de Bien’ici il y a 4 ans, le marché a bien mûri : mener une recherche avec ce critère est devenu une demande fondamentale des utilisateurs. Les agents immobiliers ont pris conscience de l’importance de capter des mandats exclusifs, ce qui a également levé des barrières sur la géolocalisation des annonces. Par ailleurs, le modèle économique de Bien’ici, qui proposait alors un forfait à seulement 70 euros par mois, ne permettait pas de financer de grosses ambitions. Pourtant, en l’espace de quatre ans, le site a connu une croissance remarquable. Aujourd’hui, de nombreux agents immobiliers se séparent d’un des trois portails leaders pour diffuser leurs annonces sur Bien’ici. Citya s’est par exemple détourné de SeLoger, tout comme Jean-Marc Torrollion, président de la FNAIM, à l’échelle de ses agences en Isère. Ce qui était jusqu’ici une fanfaronnade devient désormais une réalité.
Comment percevez-vous le développement de Bien’ici ?
Selon moi, le portail a eu deux vies. La première, c’était lors de son lancement en décembre 2015 : les agents immobiliers étaient prêts à payer 70 euros par mois pour rien puisqu’au départ, le site ne générait aucun retour. C’était alors un acte militant de devenir client, non un acte rationnel. Il y a désormais la seconde vie de Bien’ici. Fin 2018, beaucoup de nouveaux potentiels sont arrivés parmi les experts et les managers et les budgets de communication ont été revus à la hausse. Cela a été la renaissance : la promesse de détrôner un jour SeLoger, qui a un temps été oubliée, s’avère crédible. La puissance de Bien’ici est aujourd’hui telle qu’en octobre 2019, le site a généré autant de leads sortants que Logic-Immo.com. Son budget de communication, c’est-à-dire le montant des investissements liés aux campagne de publicité, aux acquisitions de trafic dans Google…, est similaire à Logic-Immo.com quand j’en suis parti en 2018.
Quelles seront vos premières décisions en tant que président ?
Ma première préconisation est de construire une force commerciale de terrain. Jusqu’ici, la relation commerciale de Bien’ici ne reposait que sur un call center basé à Toulouse. Elle se jouait donc uniquement à distance et par le biais de partenariats avec la presse quotidienne régionale. D’ici le premier trimestre 2020, nous allons bâtir un réseau de 30 commerciaux terrain afin d’améliorer la qualité des échanges avec les agents immobiliers. Ces derniers vivent et travaillent dans des zones très différentes : les attentes d’un professionnel parisien vendant un bien de 500 000 euros en 10 jours ne sont pas les mêmes que celles d’un professionnel en province. Cette connaissance de la différence peut, selon moi, constituer une force. Ma deuxième volonté est d’aider Bien’ici à poursuivre la verticalisation de son offre dans l’immobilier de commerces, la location de vacances…
L’actionnariat de Bien’ici va-t-il évoluer ?
Il restera composé de Nexity, de l’agence F4Maps, qui porte la technologie du site, du Consortium des professionnels de l’immobilier (CPI) et du Family Office « Opéra Finance International », qui a octroyé 10 millions d’euros en décembre 2018. Au premier semestre 2020, au vu des marques d’intérêt que les grands réseaux immobiliers nous portent, nous n’excluons pas de faire un nouveau tour de financement. Ce sera vraisemblablement le dernier. La particularité des actionnaires de Bien’ici, c’est qu’ils ne souhaitent pas dégager des bénéfices à tout prix, mais réinvestir les gains pour le bénéfice des clients. Lorsque nous nous réunissons en conseil d’administration, ce sont les professionnels de l’immobilier qui valident notre offre tarifaire - commercialisée à 199 euros par mois - en l’occurrence les patrons de la FNAIM, de l’UNIS, du SPI, des grands réseaux… Pour cette raison, nous pensons avoir, d’ici cinq ans, la même puissance que les gros acteurs du marché en se basant sur la même offre tarifaire qu’aujourd’hui, c’est-à-dire sans aucune augmentation de prix.
Quelles sont vos ambitions pour Bien’ici ?
Selon les chiffres de Médiamétrie de septembre dernier, le portail accueille 3,2 millions de visiteurs uniques chaque mois. Un quart de cette audience est exclusive, ce qui signifie qu’elle ne consulte ses annonces ni sur Leboncoin, ni sur SeLoger, ni sur Logic-Immo. Le portail Logic-Immo recense d’ailleurs 3,6 millions de visiteurs uniques. D’ici 2020, nous pensons donc prendre la troisième place des portails d’annonces professionnels en matière d’audience. Le mouvement de consolidation qui est en œuvre sur le marché des portails d’annonces immobilières conforte le militantisme des professionnels de l’immobilier envers Bien’ici. Lorsqu’on voit que le groupe Axel Springer a mis 1,2 milliard d’euros sur la table ces dernières années pour acquérir SeLoger, Logic-Immo, MeilleursAgents, qu’il est actionnaire à 40 % d’AC3 et qu’il se penche sur les dossiers d’acquisition de réseaux de mandataires, on ne peut que conclure que Bien’ici est une alternative crédible pour les professionnels de l’immobilier.