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iBuyers : qui sera l’Opendoor français ?

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Une centaine. C’est le nombre de transactions réalisées par des iBuyers en France depuis le début de l’année. Le modèle du marchand de biens en ligne a beau être disruptif, le phénomène reste embryonnaire. Inspirés par Opendoor qui fait des émules aux Etats-Unis, trois acteurs français expérimentent ce créneau prometteur avec un défi commun : le financement

iBuyers : qui sera l’Opendoor français ? - © D.R.
iBuyers : qui sera l’Opendoor français ? - © D.R.

Estimer en ligne la valeur d’un bien puis obtenir dans la foulée une offre d’achat ferme, sans visite, sans conditions suspensives et sans délai de rétractation de la part de l’acheteur. Le principe a de quoi séduire les vendeurs pressés ou stressés. C’est sur ce modèle que la start-up Opendoor a déferlé sur le marché américain en 2014. En échange d’une décote, les iBuyers achètent des biens aux particuliers, avec ou sans le concours d’un agent immobilier, puis se chargent ensuite de la revente, avec ou sans agent immobilier. Non seulement l’opération est très gourmande en cash, mais elle est risquée. Pour garder une longueur d’avance sur ses compétiteurs Offerpad, Zillow ou Redfin, la licorne Opendoor a levé 1,3 milliards de dollars en capital, et 3 milliards en dettes.

Grandir de manière exponentielle… ou vivoter

En France, trois acteurs se sont lancés. Dili, la filiale du groupe DigitRE (Capifrance, Optimhome) revendique l’achat de 25 biens à Paris et Lyon depuis sa création en mai 2018, puisant dans ses fonds propres. La start-up Homeloop, qui a levé 10 millions d’euros au total (dont 80 % en dettes), assure de son côté avoir acquis une dizaine de biens chaque mois depuis mars dernier, principalement à Paris et en proche banlieue.  Et enfin, Vendez-votre-Maison, qui vise 100 acquisitions en 2019 contre 79 l’an dernier. Actif depuis 2007 sous le nom d’In Vestiss, ce marchand de bien a pris le virage du iBuying en juillet 2018, se dotant d’une nouvelle marque et d’une plateforme digitale. Contrairement à ses deux confrères, il officie uniquement en zone rurale et péri-urbaine - et couvre 21 départements. Tandis que Dili a étendu son service dans une dizaine de villes de province au printemps dernier, Homeloop vient d’ouvrir à Lille et compte se développer dans une nouvelle ville chaque trimestre. L’enjeu : prouver la scalabilité du modèle, à l’image d’Opendoor, désormais présente dans 20 villes aux Etats-Unis.

La quête des financements

Si chacun a ses atouts et ses spécificités, les trois iBuyers français font face au même challenge : trouver des financements solides et pérennes pour accélérer le rythme des acquisitions… la rentabilité du modèle étant intimement liée au volume d’achats-reventes. « Nous entrons dans une phase critique : il nous faut un échantillonnage suffisant pour prouver à nos potentiels partenaires, c’est-à-dire aux banques et à nos actionnaires actuels, que le modèle est rentable en France. Dans notre cas, il est d’autant plus scalable que nous avons une présence physique sur tout le territoire avec nos conseillers », explique Olivier Colcombet, Président de DigitRE Group. Son objectif : multiplier le volume d’acquisitions par 10 en 2020. Homeloop entend quant à lui prendre 1 % de parts de marché sur les secteurs couverts.

Un modèle qui se cherche encore

Reste que les iBuyers français doivent aussi convaincre les vendeurs de payer pour un service qui oscille désormais entre 7 et 9 % du montant du bien chez Homeloop. « Avec 7 % à Paris, nous sommes compétitifs par rapport à une agence traditionnelle », rétorque le CEO, Aurélien Gouttefarde. Chez Vendez-votre-maison, la décote varie même entre 11 et 20 %. « Nous n’intervenons pas sur la même chose. La commission dépend de plusieurs critères qui ont une incidence sur la durée de détention, comme la localisation, la typologie du bien. Il est plus difficile de revendre une maison à 80 kilomètres de Paris que dans l’hypercentre », observe David Melo Pena, PDG de Vendez-votre-maison. Depuis leurs lancements respectifs, les iBuyers français ont non seulement revu leurs tarifs à la baisse, mais aussi réajusté leurs process. Plus personne ne promet une offre d’achat immédiate suite à l’estimation en ligne. Le vendeur doit désormais attendre quelques jours voire plusieurs semaines. « Notre principal frein en France, c’est la qualité de la donnée, qui est parcellaire. Nous sommes obligés d’avoir un œil humain. L’estimation 100 % en ligne est utopique », reconnaît Aurélien Gouttefarde.

Un marché voué à rester une niche ?

Si les iBuyers français semblent essuyer les plâtres de ce nouveau marché en gestation, ils croient dur comme fer au concept. « Je ne sais pas s’il faudra 12 mois ou 10 ans… mais j’ai la conviction que cette offre va se démocratiser : elle facilite la vie du vendeur, répond aux attentes des générations montantes et converge avec notre modèle », conclut Olivier Colcombet.

En 2018, les iBuyers américains réalisaient 15 000 acquisitions et 10 000 reventes, soit 0.2 % des transactions au niveau national - et 6 % sur leur plus gros marché, dans la ville de Phoenix, selon l’expert américain Mike DelPrete. Si la tendance fait grand bruit outre-Atlantique, son poids reste pour l’heure assez limité. Dans tous les cas, celui qui deviendra l’Opendoor français aura forcément les reins (et les algorithmes) solides.

Gaëlle Fillion