PLF 2025 : réactions des acteurs du logement et attentes pour l’examen du texte au Parlement
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Absence de mesures budgétaires de relance », « choix politique désastreux », « impact sur la capacité collective à mener une transition écologique progressive, inclusive et socialement équitable »… Notre partenaire News Tank compile les réactions de certains acteurs du secteur du logement et de l’aménagement au projet de loi de finances pour 2025 présenté le 10 juin 2024 par le Gouvernement.
« Le maintien de la RLS prolonge la ponction exercée sur les bailleurs sociaux » (USH)
L’Union sociale pour l’habitat « déplore l’absence de mesures budgétaires de relance, pourtant jugées essentielles par tous ». L’association représentante des bailleurs souligne notamment :
- le maintien de la RLS, « alors que tous connaissent son effet délétère, prolonger la ponction exercée depuis 2018 sur les capacités d’investissement des bailleurs sociaux » ;
- les réductions apportées aux crédits dédiés au soutien à la rénovation énergétique, « passés d’un engagement pris en 2023 par le Gouvernement de 1,2 Md€ pour 3 ans à 350 M€ pour 2 ans ». Une baisse « inacceptable au regard de l’effort que doivent porter les bailleurs dans les années à venir pour tenir la trajectoire définie dans la loi Climat et résilience, et ainsi contribuer à la fois à la maitrise des dépenses d’énergie des locataires et à la décarbonation du parc » ;
- l’absence des mesures en faveur de la relance du PTZ pour les primo-accédants, « contrairement à ce qui avait pu être envisagé ces dernières semaines ».
Emmanuelle Cosse, présidente de l’USH, déclare :
« Le PLF qui a été présenté ne peut rester en l’état. Il est en contradiction avec les affirmations du Premier ministre quant à ses intentions de lutter contre la crise du logement. Nous comptons sur une action forte de la ministre du Logement et des parlementaires qui connaissent la réalité du terrain et les ravages créés par la crise du logement.
Une baisse significative de la RLS dès 2025 est un point incontournable pour redonner des marges de manœuvre et d’investissement aux bailleurs et construire plus pour les millions de nos concitoyens qui ont besoin d’un logement social. Le soutien à l’amélioration de la performance énergétique du parc est une obligation pour lutter contre le dérèglement climatique et aider nos locataires à maitriser leurs charges d’énergie ».
Un avis partagé par Marcel Rogemont, président de la Fédération des offices publics de l’habitat :
« Le logement est toujours dans l’attente d’une décision qui soit à la hauteur des enjeux du logement social. Il y a plus de 100 000 nouveaux demandeurs de HLM depuis début 2024, soit 2,7 millions de ménages qui attendent un geste de la part du Gouvernement. »
Il en est de même pour Jean-Luc Vidon, président de la Fédération nationale des associations régionales d’organismes HLM :
[Il observe] « une baisse sensible des moyens accordés à la politique de la ville, une décision totalement inadaptée et lourde de conséquences, et une forme de mépris pour les habitants des quartiers et celles et ceux, élus, militants associatifs, professionnels du logement, qui y travaillent avec engagement. Le Gouvernement ferait bien de mesurer l’impact de ses décisions sur la vie quotidienne de millions de personnes. Il fait aujourd’hui un choix politique désastreux. »
« Le PLF 2025 ne répond pas à la gravité de la crise du logement » (Fondation Abbé Pierre)
Pour Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre :
« Ce PLF 2025 ne répond pas à la gravité de la crise du logement et ses dures conséquences pour les plus fragiles. Il faut maintenant que les parlementaires rectifient le tir ».
Il suggère plusieurs mesures :
- revenir sur les coupes budgétaires « réalisées sur le logement social chaque année depuis 2018 (et encore en 2025) et permettre de loger dignement les personnes sans domicile, les femmes seules avec enfants, les travailleurs pauvres, les jeunes… ;
- créer 10 000 places d’hébergement pour répondre en urgence aux besoins des personnes sans domicile ;
- augmenter le montant du chèque énergie, en élargissant le nombre de personnes qui peuvent en bénéficier et en continuant à le rendre automatique pour éviter le non-recours ;
- augmenter les aides à la rénovation thermique des logements en développant des aides aux maires bâtisseurs, en relançant l’accession sociale à la propriété…. ;
- soutenir plus fortement les acteurs sociaux et associatifs qui viennent en aide aux personnes en précarité.
« Super austérité » (CNL)
La Confédération nationale du logement s’inquiète des orientations budgétaires du Gouvernement pour 2025, « guidées par l’objectif d’économiser 60 Md€ », qui « pénaliserait en premier lieu les classes populaires et moyennes ». En cause : la hausse de la TICFE, la fin de la TVA réduite pour les chaudières à gaz, la réforme du chèque énergie, la baisse de moyens du Fonds Vert, de MaPrimeRenov’ et du budget de l’Ademe. La CNL dénonce une « instrumentalisation de l’écologie » au détriment des habitants.
« Cette super austérité visant à baisser le budget de l’État de 20 Md€, celui de de la Sécurité Sociale de 15 Md€ et des collectivités territoriales de 5 Md€, va accroître l’austérité déjà en vigueur qui a aggravé le déficit (6,1 % en 2024, 5,5 % en 2023) avec des conséquences sociales, écologiques et économiques pouvant être dramatiques : une personne sur deux est en difficulté pour payer ses factures d’énergie en 2024, le nombre de travailleurs pauvres explose avec l’ubérisation du travail, le chômage ne baisse pas voire a augmenté en France ces dernières années (de 13,6 % en 2015 à 15,4 % en 2023) a contrario de nos voisins européens. »
« Avec un déficit de 2,7 M€ de logements sociaux, l’urgence est d’investir dans la construction de 250 000 logements par an. Il est temps d’en finir avec la RLS qui constitue une ponction financière de plus de 10 Md€ depuis 2018 sur les bailleurs sociaux et conduit à une réduction drastique de leur capacité d’investissement et de fonctionnement. La crise du logement et la précarisation grandissante des habitants imposent des mesures d’urgence, à commencer par le gel des loyers. C’est ce qu’exige la CNL dans sa dernière pétition sur Change.org et auprès des parlementaires qui doivent discuter du budget 2025 dans les jours et semaines à venir. »
« Des économies doivent être réalisées mais pas au détriment de l’élan engagé, qui demande à être poursuivi » (Capeb)
La Capeb indique partager la nécessité de réduire les déficits publics, « mais tient néanmoins à alerter le Gouvernement sur l’impact que certaines mesures budgétaires pourraient avoir sur notre capacité collective à mener une transition écologique progressive, inclusive, et socialement équitable ».
La fédération déplore que lors des concertations avec le Gouvernement, « jamais un passage de la TVA sur les chaudières à gaz à 20 % n’a été évoqué » ; cette mesure étant une « ligne rouge » exprimée par la Capeb. « Elle aura pour conséquence d’augmenter les coûts pour les ménages et de réduire l’activité des entreprises artisanales du bâtiment en baisse continue depuis le début de l’année. »
Concernant MaPrimeRénov', « le budget 2025, s’il subit une baisse de 1 Md€ par rapport à l’engagement budgétaire précédent, correspond au niveau de consommation observé en 2024. La Capeb accueille donc cette annonce avec pragmatisme et s’interroge avant tout sur ce que le Gouvernement envisage pour que le nombre de rénovations énergétiques engagées progresse véritablement et que cette enveloppe soit consommée en 2025. L’apparent maintien du cadre réglementaire issu des simplifications de mai 2024 conjuguant parcours de rénovations d’ampleurs et mono-gestes pour l’année 2025 constituerait à ce titre un signal positif. »
Parmi les attentes :
- des réponses sur la simplification de la qualification RGE en instaurant un accès au marché par la voie de l’expérience ;
- la possibilité pour les entreprises artisanales de pouvoir se structurer en groupements momentanés d’entreprises ;
- l’instauration d’un parcours de travaux sur plusieurs années qui s’appuierait notamment sur la mise en œuvre d’aides bonifiées au fur et à mesure de la réalisation des travaux ;
- une hausse des finances pour l’accompagnement à l’embauche d’apprentis pour les entreprises (notamment les TPE) et le maintien des allègements de cotisations sur une partie du salaire des apprentis.
Selon Jean-Christophe Repon, président de la Capeb :
« Des économies budgétaires doivent nécessairement être réalisées mais pas aux dépens de l’élan en faveur des transitions à relever, qui est engagé et qui ne demande qu’à être poursuivi. Dans un contexte où les prévisions d’activité s’annoncent encore en baisse dans la rénovation, la Capeb appelle le Gouvernement à tout mettre en œuvre pour garantir la réussite d’une transition énergétique et environnementale juste, respectant les capacités financières des ménages les plus modestes et soutenant les entreprises artisanales ».
« Le Gouvernement commence à entendre les demandes concernant le PTZ et MaPrimeRénov' » (FFB)
La Fédération française du bâtiment accueille favorablement deux mesures :
- le retour à un PTZ neuf sur tout le territoire. « Il importe toutefois que l’amendement gouvernemental attendu pour préciser l’extension soit dévoilé au plus tôt, pour donner de la visibilité aux Français, notamment au sujet de la réintégration de la maison individuelle » ;
- la stabilisation de MaPrimeRénov’ dans son périmètre actuel « malgré une regrettable baisse du budget à 2,5 Md€ ». La FFB « comprend qu’on s’aligne sur ce qui est réellement consommé aujourd’hui, mais souhaite qu’une somme supplémentaire puisse être réinjectée à l’avenir, dès lors que le marché décolle ».
Elle s’oppose toutefois à quatre décisions gouvernementales jugées « incompréhensibles » :
- la suppression du dispositif Pinel « sans alternative, malgré le récent rapport de la Cour des comptes assez favorable au dispositif. La FFB appelle les parlementaires à se saisir de ce sujet, alors que le marché du locatif privé s’effondre et qu’il joue un rôle moteur dans les parcours résidentiels » ;
- le « relèvement brutal, de 5,5 % à 20 %, du taux de TVA applicable à l’installation d’une chaudière gaz en cas de remplacement du système de chauffage » ;
- la baisse du FCTVA qui « impactera inévitablement les investissements des collectivités locales et les marchés du BTP dans une période déjà incertaine » ;
- la diminution des allègements de charges au niveau du Smic, le transfert sur les entreprises d’une partie des indemnités journalières de Sécurité Sociale et la diminution d’aide à l’embauche d’apprentis. « Autant de mesures qui seront inévitablement destructrices d’emplois à un moment où au contraire, il est nécessaire de favoriser le pouvoir d’achat pour résorber le déficit public du pays. »
Olivier Salleron, président de la FFB, indique :
« Le Gouvernement a commencé à entendre les demandes de la profession concernant le PTZ et MaPrimeRénov’. La FFB déplore toutefois la perte sèche du Pinel, la baisse de l’enveloppe de MaPrimeRénov’. Les professionnels craignent les effets de la énième modification de la TVA réduite, avec l’exclusion brutale des chaudières gaz, et les mesures sur les charges contre-productives pour l’emploi. La politique du logement et de la rénovation énergétique mérite mieux que ces à-coups ».
Meublés touristiques : « Un impact relativement minime » (JD2M)
Je Déclare mon Meublé (JD2M) livre l’analyse suivante, à propos des mesures concernant le régime fiscal du LMNP :
« Même si le texte devait être adopté en l’état, son impact serait relativement minime pour la grande majorité des loueurs. L’imposition de la plus-value des particuliers, dont relèvent les LMNP, inclut un système d’abattements légaux, qui viennent diminuer le montant de la plus-value imposable au fil des années. Ainsi, au bout de 22 ans de détention du bien, les loueurs sont totalement exonérés de payer un impôt sur la plus-value, et pour les prélèvements sociaux, pour qui les abattements s’organisent différemment, la durée est de 30 ans.
Également, la plus-value ne s’applique pas dans les cas d’une donation ou d’une succession. Or, c’est justement ce qui arrive dans la plupart des cas, puisque l’activité de location meublée s’arrête généralement après plusieurs années et que le bien retourne alors dans le patrimoine privé du loueur, et fait l’objet d’une donation ou d’une succession. De très nombreux biens ne sont donc vendus que longtemps après leur acquisition, et souvent après au moins une donation ou succession, ce qui implique que la durée d’abattement n’en est que plus grande. »
« Entre volonté de rebond et situation ubuesque » (Unis)
Le syndicat immobilier UNIS retient deux points positifs au PLF 2025 :
- « Une volonté manifeste du Gouvernement d’œuvrer pour un rebond du secteur résidentiel : construction, primo-accession, rénovation énergétique des immeubles
- une méthode de travail fondée sur le dialogue entre le Gouvernement et le Parlement, et avec les acteurs de la filière. »
Mais il détaille également quatre limites :
- « Un budget minimaliste principalement contraint par la lutte contre le déficit :
- l’enveloppe MaPrimeRénov', rabotée, étant reconduite au niveau du “consommé” du budget 2024, soit une perte de 1 Md€ ;
- une remise en cause du statut du Loueur en Meublé Non Professionnel (LMNP) ;
- l’élargissement du PTZ en attente d’amendements ;
- l’absence de majorité et la recherche difficile mais indispensable d’un consensus entre les groupes parlementaires ;
- la voie réglementaire qui permettrait davantage de libertés, mais dans la limite d’un budget étriqué.
- la baisse des crédits pour les apprentis, pourtant décisifs pour les entreprises de la filière dans la décennie à venir. »
Pour Danielle Dubrac, présidente de l’Unis :
« Entre une volonté de rebond et une situation ubuesque, la filière devra se restructurer pour faire avec peu de moyens. Les prochaines années se présentent sous forme de défi ».