Les ventes aux enchères, ça marche ?
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En mars, Propriétés Privées faisait suite à Foncia et Century 21 et lançait, avec un partenaire, son site d’enchères en ligne. Quoiqu’en pleine progression dans l’immobilier, ce mécanisme de vente ne fait pas encore l’unanimité du côté des professionnels. Les enchères permettent-elles vraiment de vendre un bien
? Sont-elles uniquement efficaces pour « déstocker » des produits peu attractifs ? Retours d’expériences.
Pour Michel Le Bras, président de Propriétés Privées, les enchères en ligne ont un avantage indéniable : ʺcelui d’accélérer la confrontation entre l’offre et la demandeʺ, explique-t-il. A l’heure de l’immédiateté, où les acquéreurs comme les propriétaires cherchent des réponses instantanées à leurs questions, ce seul atout mérite qu’on s’attarde au mécanisme de ventes aux enchères. Après six mois de tests avec Imoxo et Oxioneo, le réseau de mandataires n’a tiré que des bénéfices de cette méthode. ʺLes enchères présentent plusieurs avantages : celui de vendre, de relancer un produit, de confronter un bien à son marché et de tester la réaction commerciale de nos clientsʺ, énumère Michel Le Bras. Benjamin Mondou, directeur de six agences Century 21 sur la Côte d’Azur, ne partage pas cet avis. ʺNous avons essayé le principe mais nous n’avons jamais vendu de biens. Nous avons constaté beaucoup d’engouement : les acquéreurs s’emballaient pendant les enchères puis finissaient par renoncer. C’était comme un jeu pour euxʺ, explique-t-il. Pour éviter cette dérive, Immonot, qui a lancé un service d’enchères immobilières en ligne il y a six ans, a trouvé une parade : ʺnous vérifions, en amont de chaque vente interactive, que le plan de financement des acquéreurs potentiels est viable et qu’ils ont visité le bien sur lequel il s’apprête à se positionnerʺ, précise Cyrille Cabaret, directeur de 36h Immo chez Immonot. Les simples curieux sont, de facto, exclus du dispositif.
Un dispositif pour faire baisser les prix ?
Les enchères servent-elles davantage les intérêts des professionnels de l’immobilier et des vendeurs que des acquéreurs ? La réponse ne peut pas être tranchée. Dans les grandes métropoles, où le marché est en tension, les enchères montent vite. Résultat : ʺil est possible de vendre plus cherʺ, concède Michel Le Bras. ʺA Paris et à Bordeaux, il arrive de dépasser les valeurs de présentation. La pression du marché fait grimper les prixʺ, ajoute Cyrille Cabaret. C’est d’ailleurs ce que Benjamin Mondou reproche à ce dispositif. ʺSi les acquéreurs ne vont pas au bout des enchères, c’est qu’ils s’aperçoivent qu’ils sur-payent un bien par rapport au prix du marchéʺ, confirme-t-il. Le système est ʺà contre-courant du cœur de métier de l’agent immobilier, qui est basé sur le conseil et la confianceʺ, estime-t-il. A l’inverse, les enchères peuvent également être un élément déclencheur permettant aux propriétaires (notamment les plus pressés) de « tester » l’intérêt de leurs biens auprès d’une cible d’acquéreurs. ʺSi la vente ne se concrétise pas pendant l’enchère, elle se réalise souvent après. Les vendeurs faisant souvent évoluer le prix de leurs biens sur la base d’éléments tangiblesʺ, constate Michel Le Bras. Une baisse de prix peut donc plus facilement être consentie à l’issue de cette période de test, y compris par les propriétaires les plus inflexibles. Foncia s’appuie d’ailleurs sur cette stratégie pour liquider ses mandats exclusifs qui ne sont pas rentrés au bon prix.
Aurélie Tachot