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« Nous ne sommes pas en train de vivre la fin du monde » (N. Fanchon - Gambetta)

Le | Agence immobilière indépendante

Dans une interview accordée à notre partenaire News Tank Cities, Norbert Fanchon, président du directoire du promoteur immobilier Gambetta, s’il concède que le secteur du logement, en France, est en crise veut aussi dédramatiser sa portée. « Tout est de savoir comment on s’adapte à ce nouvel environnement après avoir vécu 10 à 20 années exceptionnelles », dit-il.

Norbert Fanchon, président du directoire du promoteur immobilier Gambetta - © D.R.
Norbert Fanchon, président du directoire du promoteur immobilier Gambetta - © D.R.

Le 13 septembre 2023, le groupe Gambetta fêtera ses 100 ans. Quel est le secret de votre longévité ? 

Notre capacité à durer dans le temps est la preuve de notre constante évolution. Le groupe Gambetta a été créé en 1923 à Cholet dans un mouvement coopératif, afin de permettre à des salariés à revenus modestes d’acheter un terrain et d’y construire leur logement. La volonté de répondre aux problématiques pour loger l’ensemble des Français est donc inscrite dans notre ADN.

Dorénavant, il faut composer avec la situation actuelle. Nous faisons face à une chute de la demande et de l’offre. Il faut donc rapidement élaborer un plan permettant une plus grande accession à la propriété.

Nous avons déjà un nouveau ministre, nous attendons maintenant la vision du Gouvernement sur le logement pour la fin du quinquennat

Nous avons déjà un nouveau ministre, nous attendons maintenant la vision du Gouvernement sur le logement pour la fin du quinquennat. Le nouveau zonage et les nouveaux plafonds de ressources aideront-ils réellement à favoriser l’accession à la propriété ?

Concernant le logement intermédiaire, on remarque que l’ensemble des dispositifs de défiscalisation semblent toucher à leur fin. On se demande alors si le retour annoncé des institutionnels bénéficiera tout de même de certains avantages.

Nous sommes dans l’attente pour repositionner certains de nos produits par rapport à une nouvelle politique fiscale décidée par l’exécutif. L’avenir du logement est donc malheureusement pour l’instant tributaire de nombreuses interrogations et de trop peu de réponses.

La stratégie pour le 2e semestre 2023 sera-t-elle toujours dédiée à contrôler au maximum les risques des opérations ? 

Aujourd’hui, comme l’ensemble des promoteurs, nous favorisons les ventes en bloc auprès notamment de CDC Habitat et d’Action Logement ainsi que les dispositifs comme le BRS et le Prêt Social Location Accession (PSLA) pour permettre à nos clients d’accéder à la propriété.

Ainsi, l’ensemble des mécanismes permettant de redonner du pouvoir d’achat immobilier aux Français, par la baisse de la TVA (zonage ANRU) ou la dissociation du foncier et du bâti, nous semblent cohérents pour relancer nos ventes.

La crise est brutale dans sa vitesse. Le plan pour y faire face doit se voir au-delà de 2027.

Gambetta est également un bailleur social, ainsi les réflexions sur la création de logements intermédiaires pour notre groupe sont primordiales, à travers notamment le développement de résidences étudiantes ou de logements pour jeunes travailleurs.

Notre actionnariat particulier auprès des salariés nous permet heureusement de bénéficier d’un peu plus de délais que l’ensemble des promoteurs.

Pourtant, nous devons rester vigilants quant à la bonne santé de nos filières partenaires, comme celle du BTP. Aujourd’hui, 200 000 emplois sont menacés d’ici 2025. La crise est donc brutale dans sa vitesse et le plan pour y faire face doit se voir au-delà de 2027 et des élections présidentielles, pour s’inscrire dans le très long terme.

Le marché n’est-il pas simplement en train de se réguler après une période faste pour les promoteurs ? 

« Nous avons toujours réussi à produire des logements. Lors de la dernière grande crise entre 1991 et 1995, 60 000 logements neufs avaient été produits par an. Il est vrai que nous nous sommes habitués à un rythme de 100 000 à 120 000 logements depuis 2018.

Actuellement, nous sommes en train de revenir au rythme du début des années 2000. Il faut donc relativiser, car nous ne sommes pas en train de vivre la fin du monde. Tout est de savoir comment on s’adapte à ce nouvel environnement après avoir vécu 10 à 20 années exceptionnelles.

Ce n’est pas parce que les années passées ont été fastes qu’il faut subir pendant 20 autres années des pertes conséquentes. Il faut comprendre que de nombreux opérateurs et emplois ont été créés ces dernières années et sont donc menacés aujourd’hui. La réadaptation des acteurs du secteur à ce nouveau marché sera loin d’être simple.

Comment expliquer que le logement est d’abord vu comme une source de dépenses à maîtriser pour les pouvoirs publics ? 

Le paradoxe est que le logement est un grand pourvoyeur pour les finances publiques. Entre les droits de mutation sur le logement ancien, la TVA sur le neuf et l’ensemble des taxes payées aux collectivités lors des constructions, on se demande si l’on n’est pas dans un pays hyper fiscal avec trop de prélèvements. Si les Français ont du mal à se loger, c’est peut-être dû à cette surcharge fiscale.

Si les Français ont du mal à se loger, c’est peut-être dû à cette surcharge fiscale.

De plus, le logement est en ce moment au centre des préoccupations de l’exécutif pour faire des économies. Quand le Gouvernement indique investir énormément d’argent dans la politique du logement sans obtenir trop de résultats (mal-logement, inflation des prix immobiliers), il omet souvent l’ensemble des recettes fiscales liées au secteur du bâtiment pour le pays.

Nous nous orientons donc irrémédiablement vers un plan de relance, car une fois que Bercy aura tout fait pour maîtriser les dépenses, on se rendra compte de l’importance des recettes provenant du logement, notamment pour les collectivités locales et la stabilité de leur budget.

La régulation du foncier est-elle le principal levier pour stopper l’inflation immobilière ?

La question du foncier demeure très politique. On peut blâmer les propriétaires et les acheteurs de faire monter les valeurs des terrains. Pourtant, on ne se pose jamais la question de la quantité de logements que l’on construit.

Si l’on veut réellement faire baisser les prix de l’immobilier, il faut construire davantage de logements. Il faut revenir à l’équilibre simpliste entre l’offre et la demande. Il est important de répondre à une demande qui, même si elle est en baisse, demeure présente.

Il faut également que les populations locales et les élus acceptent à nouveau les constructions. Le refus des permis de construire et leur moindre densification sont un réel problème. On perd environ 30 % de constructibilité par an. Lorsqu’un PLU permet par exemple de construire 100 logements, seuls 70 sont autorisés. Si l’on respectait simplement ce que permettent les PLU, ce serait un énorme progrès pour le coût du foncier.

Malheureusement, en Hexagone, les promesses de constructions font davantage perdre des élections qu’elles n’en gagnent. Il faut que les partis politiques incarnent cette question du logement.

Aux États-Unis, de nombreuses personnes sont exclues du système de logement et dorment dans la rue, ainsi les partis se créent sur l’idée simple de construire davantage dans les centres-villes et les zones tendues. Des députés et sénateurs américains sont élus grâce à leur conviction de construire. En France, il manque cette incarnation qui, j’espère, se fera sentir dès 2026 et les élections municipales.

Nous avons tendance à réguler, alors qu’il faudrait libérer les terrains en densifiant davantage, tout en respectant la loi ZAN grâce notamment à l’élévation des bâtiments.

Que répondez-vous à Patrice Vergriete, ministre du Logement, qui a déclaré le 24 août dernier que l’investissement des particuliers ne permettait pas de créer des logements de qualité ? 

L’idée que l’investissement des particuliers ne crée pas des logements de qualité n’est pas nouvelle, mais c’est complètement faux. L’administration pense que le particulier ne prendrait pas soin des parties communes et ne s’intéresserait qu’à la rentabilité.

L’investisseur propriétaire a une logique patrimoniale. Penser qu’il ne prendrait pas soin de son bien est illogique.

Pourtant, tout le monde sait que dans le logement, on ne gagne pas d’argent grâce à la rentabilité, mais davantage lors de la revente. Pour faire une plus-value, l’immeuble dans son ensemble doit être parfaitement entretenu. L’investisseur propriétaire a une logique patrimoniale et penser qu’il ne prendrait pas soin de son bien est vraiment illogique.

Il faut également rappeler que les investisseurs institutionnels possédaient 1 million de logements avant les années 2000, mais qu’ils ont eu énormément de mal à vendre leurs logements à cause de l’impossibilité des locataires à racheter leur habitation. Le retour des investisseurs institutionnels n’est en rien une solution, car d’ici 10 ans, lorsque qu’ils voudront à nouveau revendre, les règles et les circonstances auront sûrement changé.