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« Le logement n’échappera pas à la rigueur budgétaire nécessaire » (Valérie Létard)

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« Tout le monde sait bien que nous sommes dans un contexte budgétaire difficile, et que le logement ne pourra échapper à la rigueur budgétaire nécessaire », a indiqué Valérie Létard, ministre du Logement et de la Rénovation urbaine, sur Franceinfo, le 23 octobre 2024.

Valérie Létard, ministre du Logement et de la Rénovation urbaine - © D.R.
Valérie Létard, ministre du Logement et de la Rénovation urbaine - © D.R.

« Quand je parle de rigueur, j’entends un effort indispensable de contribution à la réduction de la dette publique, tout en restant ambitieux et en proposant des solutions. Nous sommes dans un moment où le pragmatisme et l’efficacité priment, et cela ne passe pas forcément par un grand projet de loi logement », ajouté Valérie Létard.

La ministre précise ses ambitions pour le secteur et compte ainsi travailler prioritairement sur « des initiatives concrètes avec les parlementaires » :

• PTZ : « Nous allons permettre aux primo-accédants d’accéder à la propriété dans le neuf, que ce soit pour l’achat d’un logement collectif ou d’une maison individuelle, sur l’ensemble du territoire, qu’il s’agisse de zones tendues ou détendues. Un amendement va être déposé en ce sens et les décrets fixeront les conditions de ressources. Ces conditions seront ajustées en fonction des catégories de revenus, et nous allons faire en sorte que les taux (la part maximale du PTZ dans le financement immobilier) soient plus attractifs pour le collectif que pour l’individuel, afin de continuer à encourager le collectif. 40 000 PTZ devraient être accordés en 2024 pour un montant de 900 M€ étalé sur cinq ans. Ces ajustements permettraient de sortir 15 000 logements supplémentaires en 2025 qui représenteront environ 600 M€ de TVA.  »

Compenser la fin du Pinel  : « Le Pinel, qui incitait à la construction via des avantages fiscaux, prendra fin le 31/12/2024, et le secteur le sait depuis longtemps. Ce dispositif a coûté 25 Md€ à l’État en dix ans. Il faut le remplacer par des mesures plus efficaces, comme celles proposées dans un amendement déposé par François Jolivet (député de l’Indre, Horizons), dont l’adoption permettrait de réaliser, sur une période de 12 à 18 mois, une donation à ses enfants, exonérée d’impôts, jusqu’à 150 000 € par parent (soit 300 000 € pour un couple) pour l’achat d’un logement neuf. Il y a aussi un autre amendement qui propose d’exonérer de droits de succession les acheteurs d’un logement neuf. Actuellement, les taxes peuvent représenter jusqu’à 45 % du montant du bien. »

• Programme “Territoire Engagé pour le Logement” (objectif de 30 000 logements neufs en 3 ans) : « Durant les débats budgétaires, il y a effectivement eu des interrogations concernant des gels de crédits. Aujourd’hui, nous avons rassuré toutes les collectivités concernées que ces gels seraient levés et que les crédits nécessaires seraient disponibles pour les accompagner. »

Les sept leviers évoqués par Valérie Létard pour aider le secteur du logement

  • Augmenter pour les collectivités les droits de mutation à titres onéreux (DMTO) au-delà de 4,5  % sur les transactions immobilières :
    • « Il y a un risque d’entraver la relance du marché du logement par cette mesure. Cependant, il est évident que les collectivités, qui voient une baisse de leurs recettes de DMTO, sont impactées par la chute des transactions immobilières. Prenons l’exemple du département du Nord, qui a vu une baisse de 60 M€ de DMTO en 2024 en raison de la chute des transactions. »
  • Aménagement des restrictions de location pour les logements en copropriétés classés G au 01/01/2025  :
    • « Pour rappel, cette interdiction s’appliquera lors du changement de locataire. Si un contrat de location a débuté avant cette date, le locataire ne sera pas expulsé le 1er janvier. Sur les 30 millions de résidences principales en France, 1,9 million sont classées G et donc considérées comme des passoires énergétiques. Sur ces 1,9 million, 755 000 sont des locations dont 250 000 appartements en copropriété vont être directement impactés par l’interdiction de louer au 01/01/2025. Nous souhaitons donc assouplir le calendrier pour les copropriétés.
    • Ainsi, une proposition de loi allant dans ce sens devrait être déposée avant le 01/01/2025 pour autoriser des reports temporaires, en fonction des plans pluriannuels de travaux votés par les copropriétés. Pour les grandes copropriétés, où les travaux peuvent prendre plusieurs années, des limites temporelles bien définies seront inscrites dans le texte législatif afin d’encadrer ces reports. »
    • Sur ce point le ministère du Logement et de la rénovation urbaine précise que le véhicule législatif « sera très prochainement communiqué », le 23/10/2024. Une première proposition de loi de l’ex-député (Renaissance) Guillaume Vuilletet avait été déposée en ce sens à l’Assemblée nationale le 02/05/2024, avant la dissolution. Par ailleurs une proposition de loi “visant à réduire les contraintes énergétiques pesant sur l’offre locative et juguler leurs effets sur la crise du logement”, déposée par le député (RN) Frédéric Falcon le 01/10/2024 sera examinée en séance publique à l’Assemblée nationale le 07/11/2024.
    • « Nous allons travailler sur la base d’une initiative parlementaire portée par le député Vuilletet, qui sera reprise par un autre député. Cela permettra de prendre des dispositions législatives non pas pour supprimer le calendrier, mais pour regarder, de façon très pragmatique, les situations qui ne permettent pas d’être au rendez-vous au 01/01/2025, avait précisé Valérie Létard sur Public Sénat, le 15/10/2024.
  • Évolution de la loi ZAN  :
    • « Nous travaillons actuellement avec Catherine Vautrin et les collectivités pour assouplir les règles liées au foncier pour le logement, tout en maintenant les objectifs de sobriété. Avec le Parlement, nos sénateurs et députés, nous allons rapidement avancer sur ce sujet, car nous sommes dans un exercice délicat qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre, notamment à travers la rénovation thermique des logements. Parallèlement, nous devons préserver les terres agricoles pour garantir notre souveraineté alimentaire et limiter les risques d’inondation liés à l’artificialisation des sols ».
  • Stabilité des normes de MaPrimeRénov' :
    • « La baisse du budget alloué au dispositif pour 2025 (-1 Md€ dans le PLF) n’est pas problématique, car en 2024, tout l’argent dédié n’a pas été consommé. Plus que l’enveloppe, les grandes fédérations comme la FFB ou la Capeb attendaient surtout une stabilité des règles, notamment pour les monogestes, afin de ne pas perdre les particuliers dans des évolutions constantes concernant les types de travaux qu’ils peuvent réaliser. »
  • Encadrement des meublés touristiques  :
    • « Mon ministère a activement œuvré pour que le projet de loi porté par les députés Iñaki Echaniz et Annaïg Le Meur, qui avait été bloqué en CMP suite à la dissolution, soit rapidement inscrit à l’ordre du jour du Parlement avant la fin de l’année. C’est chose faite, avec une lecture définitive prévue le 07/11. L’objectif est de réduire la niche fiscale liée aux meublés touristiques et de donner aux maires des outils pour mieux encadrer ces pratiques, allant jusqu’à l’instauration de quotas ou même d’interdictions dans certains quartiers, si nécessaire »
  • Transformations des actifs de bureaux obsolètes  :
    • « Nous soutenons également activement pour que la loi portée par le député Romain Daubié aboutisse au terme de son parcours législatif. Nous avons des centaines de milliers de mètres carrés de bureaux vacants, souvent situés dans des zones denses, qui pourraient être requalifiés en logements étudiants, par exemple, où la demande est forte. Des ajustements au code de l’urbanisme et des incitations fiscales sont nécessaires pour encourager ces conversions. C’est un chantier majeur qui pourrait répondre à plusieurs problématiques simultanément : manque de foncier, vacance des bureaux et besoin de logements étudiants. »
  • Modification de la loi SRU :
    • « Concernant la loi SRU, il est important de rappeler que le Parlement d’hier n’est pas celui d’aujourd’hui. Néanmoins, je pense qu’il est nécessaire de faire des efforts sur l’attribution des logements sociaux. Il est crucial de veiller à ce que ces attributions soient réalisées de manière aussi efficiente que possible, surtout lorsque les logements disponibles sont rares. Par exemple, en cas de sous-occupation, il faut faciliter les mutations pour permettre à une personne vivant seule dans un T4 de déménager vers un logement plus adapté. Je suis très sensible à ces questions sociales et je pense qu’il est important de progresser dans cette direction. Cependant, je le ferai avec mesure, en consultant tous les groupes politiques et en élaborant ces décisions avec les parlementaires. Des outils comme les contrats de mixité sociale existent déjà, mais ils sont sous-utilisés. J’encouragerai les préfets à activer les leviers à notre disposition pour aider les collectivités en difficulté face aux obligations de l’article 55 de la loi SRU. »
  • Pas de retour de la taxe d’habitation  :
    • « Étant une ancienne sénatrice et élue locale, forcément, j’étais attachée à la taxe d’habitation. Cela dit, elle a été supprimée, et nous avons bien vu que d’autres fiscalités ont évolué et augmenté, comme la taxe foncière. La question de la taxe d’habitation est un débat qui se construit avec le Parlement, qui a aussi la possibilité de prendre des positions. Au Gouvernement, nous penchons plutôt pour cibler spécifiquement les acteurs ayant les moyens de contribuer, et ce de façon temporaire. Nous pensons donc qu’il vaut mieux agir sur des leviers fiscaux déjà existants et voir comment les ajuster si nécessaire. »