Reconfinement : les mandataires dans l’incompréhension
Par Christian Capitaine | Le | Réseau de mandataires
Déplorant, comme les agences immobilières, de ne pas pouvoir organiser de visites en cette période de reconfinement, les réseaux de mandataires montent au front et en appellent aux pouvoirs publics pour que la situation se débloque. Trois dirigeants témoignent. Ils nous livrent également leurs recettes pour garder leurs troupes mobilisées.
Réseau d’agences et de mandataires : même combat ! Vendredi 6 novembre 2020, les dix principales enseignes physiques se mobilisaient en publiant une lettre ouverte à Emmanuel Macron et au gouvernement. Son objet, en forme d’appel : ouvrir le dialogue afin que puisse être rétablie la possibilité de visiter les biens.
« Si nous sommes alignés sur cette position ? Bien sûr !, répond Olivier Descamps, directeur général d’IAD France. Pour les réseaux de mandataires aussi, l’incompréhension vis-à-vis de cette décision est totale. Notre position s’inscrit dans le droit au logement : se loger, c’est vital ; c’est une nécessité absolue. Je pense, en particulier, à tous ces cas difficiles : les personnes en situation de divorce, celles qui ont déposé un préavis ou encore les étudiants… »
« Il faut que, le plus tôt possible, nous trouvions avec les pouvoirs publics des solutions afin que puissent être organisées à nouveau les visites », rejoint Gabriel Pacheco, président de Safti. Car sans visite physique, pas de vente. La visite virtuelle, certes, c’est utile, mais uniquement pour les pré-visites. »
Protocole sanitaire : des professionnels parfaitement formés
Tous les professionnels de l’immobilier sont ainsi vent debout contre l’impossibilité qui leur est faite d’organiser des visites. « De plus, au regard du protocole sanitaire requis pour ces visites, nous sommes parfaitement au point, poursuit Monsieur Pacheco, tous nos mandataires sont formés. » « C’est, d’ailleurs, ce qui fait de nous des tiers de confiance, appuie son confrère chez IAD. Car si les visites organisées par les professionnels ne peuvent reprendre, c’est la porte ouverte aux visites entre particuliers. » Avec les risques sanitaires que l’on peut imaginer, notamment en matière de respect des gestes barrières…
Nombre de mandats et compromis signés en baisse
Derrière cette sombre toile de fond du marché de l’immobilier, ses acteurs, pourtant, avancent. Ils sont à la tâche. « Et c’est ce qui fait toute la différence avec le premier confinement : nous pouvons travailler », se félicite Michel Le Bras, président de Propriétés-privées.com. Outre de faire des estimations (« elles sont, chez nous, en forte hausse depuis un mois », remarque ce dernier), les négociateurs indépendants continuent à signer des mandats. Mais, crise pandémique oblige, à un rythme bien moins soutenu qu’il y a trois semaines.
« Depuis le deuxième confinement, nous avons signé 40 % de mandats en moins, déplore le président de Safti. Et comme nous ne pouvons pas organiser de visites, nous signons mécaniquement moins de compromis. » « Nous signons encore des actes authentiques. Mais les signatures de compromis vont ralentir, tout comme les mandats », confirme Olivier Descamps. Michel Le Bras, lui, martèle : « Le plus important est que nos mandataires gardent espoir, qu’ils continuent à travailler, à rentrer des mandats. Et pour cela, nous avons les outils ! La chaîne de l’immobilier n’est pas entièrement fissurée. »
Sur quels outils numériques s’appuyer ?
Parmi les outils dont les mandataires se saisissent le plus dans ce contexte de crise sanitaire figurent les visites virtuelles. Chez IAD, on est même allé plus loin en élargissant le registre aux visites dites « distancielles ». Le principe est simple : le négociateur filme le bien et le diffuse en direct à son client, via un logiciel, comme Zoom. Cette pratique, qui requiert une bonne connexion wifi, « présente un double avantage : créer du lien avec le client et lui permettre d’interagir avec nous », souligne Olivier Descamps.
Chez Propriétés-privées.com, on s’active également afin de trouver des solutions de déblocage : une fois la visite virtuelle réalisée, les mandataires proposent, à leurs clients, de signer une lettre d’engagement, dite « d’intention numérique d’achat ». Une condition suspensive l’accompagne toutefois : la visite physique ultérieure du bien. « Garder la main sur le marché se révèle primordial, ajoute le président du réseau Michel Le Bras. D’autant plus que nous avons, en face, un concurrent en moins : le marché de particuliers à particuliers. Gérer cette situation de crise et s’organiser en conséquence est, pour eux, très difficile, voire impossible. »
Un leitmotiv : garder les troupes mobilisées
Afin de garder leurs troupes mobilisées, les têtes de réseaux s’activent sur le terrain de la formation, dont, chez IAD, au travers d’émissions quotidiennes et de webinaires. « Tous nos services, au siège (soit une centaine de personnes en télétravail) sont opérationnels, dont notre veille juridique et nos personnels affectés à la formation, poursuit Gabriel Pacheco. Une soixantaine de webinaires pour se former sont ainsi déployés sur notre plateforme Safti. Notre rôle est aussi, dans cette période difficile, de soutenir nos conseillers, de faire preuve de solidarité : nous avons ainsi décidé de prendre en charge financièrement leur pack du mois de novembre. »
Et d’ajouter : « Nous sentons parmi, nos mandataires, de la lassitude et de l’inquiétude face à cette situation. Et c’est bien normal. Mais, heureusement, dans une moindre mesure que lors du premier confinement, car l’activité, une fois celui-ci levé, avait repris très fortement. »
Croissance maintenue malgré la crise
Quelles perspectives dresser, dès lors, pour l’activité des réseaux de mandataires dans ce contexte ? Chez Safti, et ce malgré trois mois « minimum » de confinement, le CA devrait progresser, cette année, de 10 % versus 2019. « Lors du déconfinement, nous avons connu une période euphorique de rattrapage avec une croissance de nos compromis sur le mois de juin de près de 100 % par rapport à 2019 », confie Gabriel Pacheco.
Même dynamique haussière chez IAD : « Nous sommes confiants dans la capacité de résistance de notre modèle face à la situation, affirme son directeur général. Notre début d’exercice, d’ailleurs, a été très bon (le réseau le clôture traditionnellement le 30 juin) et nous continuons à recruter : nous comptons aujourd’hui 11 600 mandataires, contre 10 000 début mai 2020. »
Quelles aides pour les moins expérimentés ?
Et les dirigeants des réseaux de mandataires de lancer au pouvoir public une dernière requête : que soit clarifié le montant des aides dont pourront bénéficier, ou non, les négociateurs les plus récemment intégrés aux réseaux. « C’est le flou total !, lance l’un d’eux. Et notamment pour ceux qui ont moins d’un an d’ancienneté. Pourront-ils bénéficier du fonds de solidarité ? »