Agences immobilières : l’envoi d’un rappel aux règles réduit les pratiques discriminatoires
Le | Sites pour les professionnels
« L’envoi des courriers nominatifs par le Défenseur des droits a produit des effets positifs sur le comportement des agences immobilières suspectées de discriminations », indiquent des chercheurs en sciences sociales des universités Paris-Est Créteil et Paris-Est Marne-la-Vallée, auteurs d’un rapport sur les pratiques discriminatoires dans les agences immobilières, publié le 08/10/2019. L’étude fait suite à un appel du Défenseur des droits et du ministère de la Cohésion des territoires.
L’envoi d’un courrier de rappel aux règles, signé par le Défenseur des droits, « réduit significativement la discrimination à l’encontre du candidat appartenant au groupe minoritaire jusqu’à 9 mois après son envoi. L’effet s’atténue dans le temps et ne se maintient pas 15 mois après l’envoi du courrier ». Le courrier est « un puissant réducteur de discriminations ».
Un test de correspondance a été effectué par paire sur le critère d’origine auprès de 3 260 agences immobilières dans les 50 plus grandes aires urbaines. « Il nous a permis d’identifier 343 agences à risque discriminatoire réparties au hasard en 2 groupes », indiquent les chercheurs. Le 1er groupe a reçu un courrier de sensibilisation signé par le Défenseur des droits, précisant qu’elles font l’objet d’un test et rappelant le cadre légal et les sanctions auxquelles elles s’exposent en cas de pratiques discriminatoires. Le 2e groupe n’a rien reçu.
3, 9 et 15 mois après réception du courrier, lors d’un nouveau test à l’aide d’une paire de candidats fictifs « l’un avec une origine française présumée, l’autre maghrébine », les agences qui ont reçu le courrier du Défenseur des droits ne font pas de différence entre les 2 candidats. Dans ces agences, l’écart de 10 points de pourcentage entre le candidat d’origine française et maghrébine « disparaît entièrement dans le groupe traité ». « Les agences qui n’ont pas reçu d’avertissement maintiennent des comportements discriminatoires tout au long de l’expérimentation », indique l’étude. Dans le groupe ayant reçu un courrier, « le candidat présumé maghrébin a reçu 44,8 % de réponses positives tandis que le candidat présumé d’origine française a reçu 46,3 % ». Dans l’autre groupe, « le candidat présumé maghrébin a reçu 27,5 % de réponses positives tandis que le candidat présumé d’origine française a reçu 38,9 % ».
Un testing de SOS Racisme en mai 2019 et un « plan d’actions » annoncé par le Gouvernement
En mai 2019, SOS Racisme publiait les résultats d’un testing révélant que 51 % des agences immobilières acceptaient les pratiques discriminatoires raciales demandées par les propriétaires. L’association avait été reçue par Julien Denormandie, ministre chargé de la Ville et du logement, aux côtés de l'UNPI, l'UNIS, le SNPI et la Fnaim.
Le ministre avait alors annoncé la mise en place d’un « plan d’actions » contre ces discriminations, fondé sur la formation obligatoire des professionnels de l’immobilier, le développement d’outls de lutte effectifs contre les discriminations et des contrôles du CNTGI et de la DGCCRF.
Des études plaidant « pour des réactions de politique publique »
D’autres études menées notamment en 2011, 2012, 2019 plaident « pour des réactions de politique publique », indiquent les chercheurs. Ils citent plusieurs tests :
- Une enquête qualitative menée en 2011 auprès de 30 agents immobiliers. Elle « illustre la prégnance d’un discours et de pratiques discriminatoires ethno-raciales qui paraissent très affirmés sur le marché immobilier.
- Une étude de l’IFOP en 2012 »montre que les discriminations dans l’accès au logement sont perçues comme fréquentes par le grand public et qu’elles sont davantage ressenties par les résidents en ZUS (zones urbaines sensibles)« .
- Une étude réalisée en 2019 »est le 1e testing dans l’accès au logement de couverture nationale, sur les 50 plus grandes aires urbaines de France métropolitaine, couvrant plusieurs critères de discriminations. « Relativement au candidat de référence présumé d’origine française, le candidat maghrébin a 26,7 % de chances en moins de voir ses démarches d’accès au logement aboutir. Ces discriminations sont très marquées pour les offres qui émanent de particulier set elles le sont aussi pour les offres diffusées par les agences immobilières ».